Alors que Noël approche, les chrétiens de plusieurs pays viennent à nouveau d’être la cible d’attentats. Marc Fromager, directeur de l’AED, répond aux questions de l’hebdomadaire LA VIE dans un entretien mené par Sophie Lebrun

Un attentat a eu lieu au Pakistan dimanche 17 décembre dans une église méthodiste en plein office. Aujourd’hui que savons-nous sur cette attaque ? 

Comme souvent, les terroristes ont choisi d’attaquer une église au moment où il y avait le plus de personnes rassemblées, l’objectif étant de faire le plus de morts et de blessés possibles. Ici, il y a eu huit morts et une trentaine de blessés mais le bilan aurait pu être beaucoup plus lourd. La tactique est ainsi d’effrayer les fidèles pour les dissuader de pratiquer mais aussi de les amener à se convertir à l’islam pour avoir la paix.

D’un côté, on peut dire que cela ne fonctionne pas : les chrétiens continuent de fréquenter les églises et on observe même un renforcement de la pratique. Une forme de résistance et un resserrement communautaire poussent les gens à retourner dans les églises après ce type de drame. D’un autre côté, ces attaques répandent en effet l’effroi dans ces communautés, confrontées à des attentats à répétition, en particulier au moment des fêtes, et on ne peut en nier l’impact sur le long terme.

En Russie, ce même dimanche, un attentat contre une cathédrale à Saint-Pétersbourg a été déjoué à temps. La période de Noël est-elle plus risquée pour les chrétiens dans le monde ? 

Il y a, certes, des attentats contre les églises qui ne sont pas en rapport avec le calendrier liturgique, mais on observe quand même une redondance autour des fêtes religieuses : Noël, mais aussi Pâques, la semaine sainte, la Pentecôte ou encore l’Ascension. Cela a été le cas en Égypte lors du dimanche des Rameaux cette année, meurtrie par un double attentat, ou encore au Kenya, quelques jours avant Noël l’an dernier.

L’impact est perçu comme maximal car les églises voient leur affluence augmenter pendant les temps de fêtes religieuses – même si en réalité, l’affluence est toujours grande – mais surtout, les terroristes recherchent une dimension symbolique. Au-delà de la profanation du lieu de culte, il y a celle d’un « jour sacré » et l’opération de « communication » macabre qui en découle. Quant à Noël, sa portée est particulière : c’est la fête des enfants, de l’innocence, la fête d’un Dieu qui se fait bébé, vulnérable.

Est-ce que la déroute territoriale de Daech est un facteur d’apaisement ou de regain de tensions pour les chrétiens au Proche-Orient ? 

Au nord de l’Irak, on estime que plus d’un tiers des chrétiens réfugiés au Kurdistan irakien sont déjà rentrés chez eux. L’affaiblissement du contrôle territorial de l’État islamique leur a permis de retrouver leurs maisons, leurs villages et leurs églises. Mais dans d’autres régions du monde, des groupes islamistes affiliés à Daech, eux, n’ont pas été défaits et continuent leurs attaques. Mi-décembre, deux femmes kamikazes se sont faites exploser dans une paroisse au nord du Nigéria, entraînant la mort de trois catéchistes.

Les années précédentes, la période de Noël était-elle déjà sous tension pour les chrétiens dans le monde ? 

En effet, l’augmentation régulière du nombre d’attentats pendant cette période dans un certain nombre de pays a fini par créer une tension supplémentaire au moment des fêtes. Il faut se rappeler par ailleurs que dans les pays orientaux, Noël est fêté le 7 janvier, ce qui fait que la « période de Noël » couvre en réalité deux semaines, ce qui rallonge la période à risque.

Cette année, entre le Pakistan, le Nigeria et l’attentat déjoué en Russie ainsi qu’une opération de répression auprès de séminaristes en Inde, cela fait beaucoup… et il reste encore quelques jours avant Noël.

Face à ces situations répétées, que font les chrétiens pour protéger leurs célébrations de Noël ? 

Dans la plupart de ces pays déjà touchés, les chrétiens ont mis en place des « filtres » humains, des personnes vérifiant qui entre dans l’église, voire même dans le parvis. Ce « périmètre » sécurise légèrement les lieux : il peut avoir un effet dissuasif, il peut aussi permettre de confiner l’attaque aux abords de l’église plutôt qu’à l’intérieur, réduisant ainsi le nombre de victimes.

Malheureusement, cette tension se rapproche de nous : ce « périmètre de sécurité » commence de plus en plus à se mettre en place en France lors des grandes fêtes chrétiennes. Pour Noël, le parvis de la cathédrale de Notre-Dame de Paris est entièrement sécurisé, ce qui rallonge le temps d’accès. Des mesures de sécurité sont ainsi mises en place et on ne peut que regretter qu’il faille dorénavant veiller à cette question. C’est le signe d’une menace qui n’existait pas avant et qui maintenant nous concerne aussi.

(Source: LA VIE)

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