Au pouvoir depuis 17 ans, le président congolais compte bien y demeurer. Seule l’Église semble décidée à s’y opposer, pour le bien de la population, abandonnée à son sort en dépit des immenses richesses de ce pays. (Article rédigé par Marc Fromager pour Valeurs Actuelles)

On évoque souvent le Congo comme un scandale géologique et il est vrai que ce pays est un véritable coffre-fort avec une concentration de minerais qui rendrait folle n’importe quelle multinationale minière. Le problème, c’est que les multinationales sont au courant et poursuivent le pillage de ce pays depuis bien longtemps.

Alors que la majorité des habitants de la planète se promène en réalité avec un morceau de Congo dans la poche – les téléphones portables contiennent du coltan, massivement extrait du Congo – la population congolaise demeure une des plus pauvres au monde, sans même parler des plus de 5 millions de victimes au cours des deux dernières décennies, principalement liées au dépeçage de la partie orientale du pays, là où sont les minerais.

Arrivé au pouvoir en 2001 à la mort de son père, Kabila dirige donc le Congo depuis 17 ans. Phase de transition dans un contexte de guerre civile, élection en 2006 puis en 2011, il aurait dû quitter le pouvoir le 20 décembre 2016, la constitution limitant à deux le nombre de mandats présidentiels.

Dans un premier temps, l’Église, véritable et sans doute seule institution encore opérante dans le pays, va chercher à apaiser la situation en servant de médiatrice. De nouvelles élections devaient être organisées le mois dernier, en décembre 2017. Mais l’accord n’est pas respecté et Kabila se met à parler de décembre 2018, voire 2019.

L’opposition politique dénonce un coup d’Etat et l’Eglise s’estime à juste titre lésée : elle s’est engagée dans ce processus politique avec un accord qui est aujourd’hui totalement bafoué, sa parole se voit ainsi délégitimée. Mais au-delà de cette humiliation, il s’agit bien de l’avenir du pays et de sa population qui comprend assez aisément que l’on persiste à la voler.

Des marches pacifiques sont alors organisées mais réprimées violemment. Le « Comité laïc de coordination » (CLC), une association fondée en novembre 2017, avait invité les fidèles à marcher, bibles, chapelets et crucifix à la main. Le dimanche 31 décembre 2017, les églises de RDC ont alors été attaquées. Pas moins de 134 églises et chapelles ont été visées ! Et cela s’est reproduit ce dimanche, 21 janvier.

Les policiers sont intervenus dans les églises avec des gaz lacrymogènes alors que les fidèles étaient en pleine prière et la plus grande église du pays, Notre-Dame du Congo, située dans le quartier populaire de Lingwala, au nord de Kinshasa, a été évacuée par la force. Des tirs à balle réelle ont également été reportés. La Monusco a rapporté un bilan élevé : six morts, 57 blessés et 111 personnes arrêtées.

Le cardinal Monsengwo, archevêque de Kinshasa, a haussé le ton. Lors d’une messe pour les victimes de la colonisation belge, il a critiqué le pouvoir en place, comparant ses pratiques aux barbaries du passé congolais. Le départ de Kabila semble être devenu impératif pour le cardinal.

Le pape François, ému que des églises soient prises pour cible, a demandé dimanche aux autorités de « mettre en oeuvre tous leurs efforts pour éviter toute forme de violence et chercher des solutions en faveur du bien commun ».

Qui l’emportera ? En attendant, les Nations Unies ont déclaré en octobre un «niveau 3 d’urgence» en RDC, une catégorie attribuée seulement à trois autres pays : la Syrie, l’Irak et le Yémen.  L’année dernière, 922 000 personnes ont été déplacées dans le pays, plus que partout ailleurs dans le monde.

Marc FROMAGER
Directeur AED

Source: Valeurs Actuelles

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